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Prélèvement à la source : pourquoi un tel acharnement de Bercy ?

Pourquoi Bercy s'acharne-t-il à mener une réforme dont le Conseil des prélèvements obligatoires, dans son rapport de février 2012, a expliqué le peu d'intérêt !

Le Premier ministre a annoncé le report du prélèvement à la source au 1er janvier 2019. Ce report doit, indique le Ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin « permettre d'examiner la robustesse technique et opérationnelle du dispositif et d'évaluer la réalité de la charge induite pour les collecteurs, en particulier les entreprises, au moyen d'un audit et d'une expérimentation ». Un audit qui sera conduit par une équipe de l'Inspection générale des finances et d'un cabinet indépendant.

Pourquoi Bercy s'acharne-t-il à mener une réforme dont le Conseil des prélèvements obligatoires, dans son rapport de février 2012 consacré à ce sujet précis, explique le peu d'intérêt ! Relisons la conclusion du rapport :

« Au final, à architecture constante des prélèvements obligatoires et compte tenu du contexte budgétaire, le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu a sans doute perdu une grande partie de son intérêt. Les deux améliorations significatives qu'il pourrait apporter seraient la diffusion plus rapide des nouvelles dispositions fiscales dans l'économie d'une part, et la taxation contemporaine des revenus d'autre part, cette dernière permettant un ajustement plus rapide de l'impôt aux baisses de revenus des contribuables.

« Comme le rappelait le Conseil des impôts en 2000, le prélèvement à la source n'est qu'un des moyens, parmi d'autres, pour atteindre cet objectif – et il ne permet de l'atteindre qu'à certaines conditions spécifiques. Compte tenu de la structure du paysage socio-fiscal français, d'autres dispositifs, plus simples et probablement moins coûteux pour les entreprises et pour l'administration, permettraient de se rapprocher de cet objectif : la promotion des nouveaux services offerts par l'administration fiscale, voire l'imposition contemporaine des revenus sans la retenue à la source.

« Ce constat ne doit toutefois pas conduire à écarter définitivement, et en toutes circonstances, le recouvrement de l'impôt par voie de retenue à la source. Celui-ci reste l'un des moyens les plus efficaces de réaliser l'imposition contemporaine des revenus. La pertinence d'une extension du prélèvement à la source devrait dès lors être réexaminée s'il était décidé de procéder à une réforme profonde de l'imposition des revenus ».

Curieusement, Bercy soutient le contraire : « Le prélèvement à la source constituera un progrès pour les Français en permettant d'ajuster en temps réel la perception de l'impôt à l'évolution des revenus et de la situation de chacun » (communiqué de Gérald Darmanin). La raison de cet acharnement tient au fait que « les agents de la Direction générale des finances publiques ainsi que les entreprises, employeurs publics, organismes de protection sociale et éditeurs de logiciels, ont beaucoup travaillé pour la préparation de ce projet » (même communiqué).