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25 500 milliards d'euros bien au chaud

Les actifs financiers détenus par des particuliers et dissimulés dans des paradis fiscaux pourraient atteindre jusqu'à 25 500 milliards d'euros, selon une étude de Tax Justice Network.

C'est la principale conclusion d'une étude rédigée par James S. Henry, ancien économiste en chef du cabinet américain de conseil en management McKinsey, et publiée le 22 juillet par le groupe de pression Tax Justice Network. Ainsi, les actifs financiers détenus par des particuliers et leurs familles et dissimulés dans des paradis fiscaux atteindraient 21 000 milliards de dollars (17 000 milliards d'euros) selon une estimation conservatrice, montant qui pourrait s'élever jusqu'à 32 000 milliards de dollars (25 500 milliards d'euros) d'après cette ONG britannique de lutte contre l'évasion fiscale.

A titre de comparaison, les 25 500 milliards d'euros évoqués dans l'étude représentent la production nationale annuelle combinée des Etats-Unis et du Japon. Par ailleurs, l'incroyable richesse recensée par les recherches de James S. Henry appartiendrait à une infime minorité, à savoir seulement 10 millions de personnes.

A l'heure où les gouvernements européens ne cessent d'accroître la pression fiscale sur leurs citoyens afin de réduire leurs dettes et que les pays les plus pauvres peinent à rembourser la leur, cette annonce fait l'effet d'un véritable coup de tonnerre.

En effet, en supposant que ces sommes dissimulées à l'administration fiscale rapportent 3 % de rendement annuel à leurs détenteurs et que les gouvernements puissent être en mesure d'imposer ces revenus à 30 %, ce sont entre 155 et 225 milliards d'euros qui échapperaient aux états chaque année, soit davantage que le budget annuel de l'aide au développement. « Cet argent ne bénéficie qu'à une poignée de personnes alors qu'il pourrait permettre d'éponger une partie ou l'intégralité de la dette nationale qui, elle, est supportée par toute la population de ces pays souvent pauvres », ajoute l'auteur de l'étude. C'est la « face sombre de la mondialisation » qu'il souhaite ainsi dénoncer.

James S. Henry ne s'en tient pas à ces constations. Il n'hésite pas à pointer du doigt les banques privées, parfois complices : « Les richesses des plus riches sont protégées par une horde de conseillers professionnels très bien payés », qui tirent parti d'une « économie mondiale de plus en plus ouverte et fluide ». En effet, les dix principales banques impliquées dans l'optimisation fiscale auraient géré en 2011 presque 5000 milliards de dollars placés dans des paradis fiscaux contre seulement 2 000 milliards de dollars cinq ans plus tôt.

Néanmoins, le spécialiste entretient l'espoir en tirant des enseignements positifs de ces résultats, et affirme que « cette étude est aussi une bonne nouvelle puisque le monde dispose ainsi d'une importante réserve qui pourrait un jour résoudre certains de nos problèmes ». En France, l'évasion fiscale coûterait entre 40 et 50 milliards d'euros par an au budget de l'Etat, selon les récentes déclarations d'Eric Bocquet, rapporteur de la Commission Parlementaire sur les paradis fiscaux.

Mis en ligne le 31 Juillet 2012