Fiscalité

Plus-value mobilière en report d’imposition : la Commission européenne défend le contribuable français !

Olivier Rozenfeld, président de Fidroit, explique comment la Commission européenne défend le contribuable français sur la question du report d’imposition de l’article 150 OB-Ter du CGI sur les plus-values mobilières. 

L’instruction engagée par la Cour de Justice de l’Union européenne saisie par deux décisions du Conseil d’Etat a abouti à une position favorable aux contribuables. Ils contestaient l’incidence fiscale des régimes de report d’imposition de l’article 150 OB-Ter du CGI (né de l’apport de droits sociaux à une autre société assujettie à l’impôt sur les sociétés) sur les modalités de taxation des plus-values mobilières.

En effet, l’analyse de certaines situations peut montrer qu’en cas d’échange et du bénéfice d’un report, les contribuables pourraient être pénalisés.

Un long feuilleton fiscal 

Le sujet des échanges de titres est l’objet d’un long feuilleton fiscal. D’un régime de sursis d’imposition de l’article 150-OB, nous avons connu une modification importante en 2014 avec la création de l’article 150 OB-Ter qui prévoit un report d’imposition.

Le nombre d’opérations contestées, pour des motifs d’abus de droit, par l’administration et les tribunaux, sans pouvoir dégager de solution claire a amené le législateur à mieux baliser juridiquement ces opérations avec l’article 150 OB-Ter. Cet article « anti-fraude » permet aux contribuables de connaître avec précision le chemin à respecter pour ne pas s’attirer les foudres du fisc.

Dans la dernière version de ce nouvel article du CGI, les règles fiscales veulent que le taux d’imposition soit figé au jour où l’échange de titres est réalisé. Aussi, en cas d’évolution favorable du régime de taxation des plus-values par exemple, le cédant des titres, par ailleurs bénéficiaire du report, pourrait en être exclu.

Dans ce contexte, l’effet du report d’imposition est contraire à l’impératif de neutralité fiscale des opérations d’échange de titres.

La Commission européenne estime en effet que l’impératif de neutralité fiscale implique qu’une opération d’échange de titres soit regardée au plan fiscal comme une opération dite « intercalaire ». Dans ce cadre, elle ne peut  avoir une quelconque incidence fiscale sur l’imposition de la plus-value au terme de la période de report. Report qui tombe en particulier avec la cession des titres obtenus de l’opération d’échange.

Il faut en conclure que le bénéfice du report d’imposition ne doit pas être susceptible d’aboutir à une taxation différente de celle qui se serait appliquée sur la plus-value de cession en l’absence d’échange. La durée de détention qui conditionne l’abattement affectant positivement le calcul de la plus-value ne doit pas être alors « rompue » par l’apport de titres par exemple.

Affaire à suivre de près dans la mesure où ce nouveau « revirement », qui serait initiée par la cour de Luxembourg, pourrait alors modifier sensiblement les règles du jeu et les critères d’un bon choix stratégique…

Olivier Rozenfeld (avril 2019)