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Europe : Aviva Investors analyse la situation avant les élections

Le Brexit continue à faire la une au Royaume-Uni, mais l’Union européenne est confrontée à d’autres défis. Aviva Investors dresse un bilan en évoquant les risques encourus.

L’Europe est soumise à des tensions contradictoires, avec des questions qui tardent à trouver leurs réponses. Il y a le dossier Brexit, qui n’en finit plus, la montée de l’euroscepticisme en Italie ou encore la situation politique en Allemagne, avec le départ annoncé de la chancelière. Aviva Investors fait le point avant les élections européennes de fin mai.

Pour Stewart Robertson, économiste senior pour le Royaume-Uni et l’Europe chez Aviva Investors, l’Europe devra résoudre certains problèmes « urgents », notamment les fractures politiques et économiques. Le mélange du populisme eurosceptique, de la dette élevée et de la croissance « anémique » de l’Italie porte à croire que le pays pourrait à son tour décider de quitter l’Union européenne. Etant donné que l’Italie utilise la monnaie unique, les conséquences seraient « bien plus néfastes » que le Brexit. Relibellé en lire, le niveau de richesse italien chuterait et les dettes libellées en euro seraient « impayables », provoquant une onde de choc dans toute la zone euro et les marchés financiers. Selon la Banque d’Italie, les ménages italiens disposent collectivement d’un patrimoine de 10.500 Md€, dont 4.200 Md€ d’actifs financiers. Dans ces conditions, un changement de gouvernement serait plus probable qu’une sortie de l’Italie de l’Union européenne.

Un impact considérable

En attendant, les pays du nord de l’Europe enregistrent de « solides » performances, accumulant des excédents qui contribueront aux déséquilibres dans l’ensemble du bloc. L’an dernier, l’Allemagne a, selon l’IFO, enregistré un excédent courant estimé à 300 Md$ (7,8 % du PIB), le plus important au monde, pour la troisième année consécutive. « L’Europe a besoin du rééquilibrage de l’économie allemande, mais il est politiquement difficile pour l’Allemagne de renoncer à son excédent courant durement gagné, remarque Ed Kevis, gérant actions européennes chez Aviva Investors. L’Allemagne a bénéficié d’une monnaie artificiellement faible. L’idéal serait que le gouvernement allemand investisse dans des infrastructures, au niveau national et à l’échelle européenne, pour redistribuer une partie de cet argent. »

Si une autre crise survenait, un transfert fiscal plus direct du nord vers le sud pourrait être nécessaire pour sauver les économies endettées. Mais les plans de sauvetage sont une question politiquement « sensible » en Allemagne et dans d’autres pays du nord comme le Danemark, la Finlande, l’Irlande, la Suède, les Pays-Bas et les Etats baltes. Stewart Robertson oppose la zone euro aux Etats-Unis, qui réagissent différemment aux pressions économiques internes. La crise américaine de l’épargne et des prêts dans les années 1980 et 1990, par exemple, a entraîné la faillite de plus de 1 000 petites banques, principalement dans le sud du pays. Le plan de sauvetage de 50 Md$ du gouvernement fédéral en 1989 s’est soldé par le transfert des Etats américains aisés sur les côtes est et ouest vers ces régions économiquement plus faibles. « Le coût proportionnel pour les Etats américains plus aisés était bien plus élevé que celui des pays riches d’Europe pendant la crise de l’euro », souligne l’économiste.

Selon Aviva Investors, l’avenir politique de l’Union européenne aura un impact « considérable » sur les marchés à travers le continent. L’Allemagne est en pleine mutation. Sa croissance économique a commencé à ralentir et semble de plus en plus déséquilibrée par la domination des grandes entreprises exportatrices dans les secteurs de l’industrie et de l’automobile. « Si la guerre commerciale entraîne un ralentissement de la croissance chinoise, ajoute Ed Kevis, cela affectera les sociétés automobiles, ainsi que les multinationales allemandes exposées à la Chine. »
Michel Lemosof